20 ans après

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(Ou presque…)

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Inconfortable. De cette expression nonchalante – certains diraient presque noble -, et pourtant nullement à l’aise, il restera toujours une trace sur chaque photo future où j’apparaîtrai au fil des années. Je n’abhorre point cette tradition mais je suis loin de me sentir modèle et ne sais comment me tenir, alors j’attends.

Des cendres de mon style ravageur (chemise, salopette, et mocassins) immolé par l’indifférence sur l’autel de l’adolescence, ne renaîtra un semblant de classe que vers la fin de la deuxième décennie de mon ère. Et cela, principalement sous l’impulsion “classique” d’une petite amie. Cette nouvelle vague perdurera jusqu’à nos jours, à défaut de continuité sentimentale.

Le visage s’allongera, les joues se creuseront un peu et les cheveux s’assombriront, finissant même par s’effacer presque entièrement. Mais les cernes – poches de temps perdu sous les fenêtres de l’âme – sont dès lors, d’ores et déjà mes blessures de guerre à moi. Ni un regret, ni une honte, elles portent l’étendard de mon identité autant que je les porte, elles.

A l’instar du couple que sont ce jardin, flou en arrière plan, et ce banc, quelque peu grossier mais droit, et dont le premier va grandir, fleurir et se métamorphoser avec les âges passant, tandis que le second les traversera avec pour seule marque de changement cette couche de mousse qui s’y déposent, je grandis, je change, et je me transforme, mais je reste aussi pareil à cet enfant : légèrement perdu malgré son apparence peu commode, et pourtant content d’être là.

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Texte ébauché en atelier d’écriture et retravaillé par la suite.

Elle : disloquée, réunie.

C’est une fille de haute liesse, à prendre la vie en proue, hisser les heures à vive allure. Une femme libre de son essor, destinée à être maîtresse. Elle exècre son ombre, sa chaleur, sa voix. Ne supporte plus son odeur ni le bruit de sa vie. Une femme d’espace amoureux saturé de miel et d’ombres intimes, de fière approchée, de tressaillement secret. Elle s’obstine à embraser la neige, à interrompre le silence. Elle veut ne plus vouloir sans jamais vouloir ce qu’elle ne veut. A l’aigu de la fatigue elle vacille mais demeure debout. Elle crie son corps de partout. Brûle. Implore : aime moi. Elle est de ce qui croît, persiste et tient. Arpenteuse chargée du poids léger de l’amour. Elle dort. Et le monde alentour tait sa trépidante vigueur.


Texte court inspiré des écrits de Colette Nys-Mazure dans Singulières et plurielles, à base de phrases piochées ici et là et d’un soupçon de réécriture, pour dresser le portrait d’une femme.